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Mon chat est trop gros, priez pour nous
Par Christian Allard, Dip.cn
 

Avertissement : J’ai composé ce texte afin de partager une réflexion, il ne doit en aucun cas remplacer les recommandations d’un professionnel de la santé. Je suis intervenant diplômé en nutrition et en comportement, je travaille dans ce domaine depuis 20 ans déjà. Je ne me qualifie pas d’Expert, les Experts savent tout, alors que moi, j’ai le bonheur d’apprendre à tous les jours… Ce texte amène à réfléchir à des petites choses que l’on fait parfois, par automatisme, les yeux fermés. Je propose d’ouvrir les yeux, la pensée, afin de prendre des décisions éclairées sur les soins apportés à son animal. Je suis ouvert aux questions et commentaires via la page Facebook de Profil Canin. Bonne lecture et surtout, bonne réflexion!

 

À mon travail, j’entends ce genre de phrase en moyenne 2 à 3 fois par jour : ‘’Je dois me confesser: On trouve que mon chat est trop gros, il faut que je lui fasse perdre du poids, on m’a recommandé un bol interactif et de la nourriture légère…’’

C’est tellement fréquent, qu’il y a forcément quelque chose qui cloche… Plusieurs propriétaires de chats semblent avoir commis un grand péché… Celui d’avoir fait grossir leur chat… Ces phrases entrées de force dans la bouche des propriétaires, à grands coups de reproches dissimulées, font naître en eux, la Sainte Culpabilité, celle qui pousse à dépen$er de l’argent sur des produits avec lesquels, ils pourraient nettoyer leur âme salie... Soulever un problème afin de vendre LA solution, ainsi va la religion de l’industrie.

Comprenez-moi bien, je suis conscient que le surpoids est un réel problème de santé Important. L’obésité chez le chat atteint des proportions épidémiques. Cependant, est-ce que le problème réside uniquement dans la nourriture? Et surtout, est-ce que le bol interactif est si miraculeux?

 

De nombreuses études le prouvent, rien ne sert de faire un régime restrictif pour perdre du poids de façon saine et durable. C’est vrai qu’une nourriture adaptée aux besoins du chat est primordiale, je ne ferai pas ici le procès de certaines marques, les Experts qui savent tout s’en chargent déjà… Ici le point est plutôt de voir si la façon de nourrir peut avoir impact, au même titre que la qualité ou la quantité de nourriture.

 

Pour se faire, mettons-nous dans la peau d’un propriétaire de gros chat, appelons ce chat Thomas, nous sommes chez son professionnel de la santé. On nous annonce que le Thomas doit maigrir, qu’il faut changer sa nourriture pour la formule légère vendue sur place (comme c’est pratique!), il faudra contrôler religieusement la quantité de croquettes servies et se procurer un bol interactif, avec lequel on devra nourrir Thomas pour des siècles et des siècles, Amen.

Devant la culpabilité, les reproches et ce sentiment insupportable de penser que l’on a fait du mal à Thomas, il est plus facile de croire que, peut-être, ça fait du sens… C’est même un peu gênant de penser autrement devant tant d’autorité. On honore alors les paroles prononcées, on achète la nourriture et ce ‘’Saint Graal interactif’’ aux vertus si miraculeuses, puis on respire profondément au moment de payer la facture, en levant les yeux vers le ciel…

 

De retour au foyer, le doute surgit et nous fait fouiller le web, on le lit ici, puis à un autre endroit, tiens? Cette dame dit que ça marché pour son chat, il y a même une vidéo… Les Experts le disent : en nature, un chat se doit de chasser pour se nourrir, donc c’est logique qu’ils doivent dépenser de l’énergie pour manger dans la maison aussi… Puis au fil des lectures, on est maintenant convaincu, le voici notre pardon pour étouffer cette culpabilité d’avoir rendu Thomas obèse… Après tout, si plusieurs Experts et disciples du régime restrictif et du bol interactif l’écrivent sur le web, ce doit être vrai non? Et doucement, enfin, l’inconfort du doute s’estompe…On va de l’avant, tête baissée.

On réduit alors la quantité des repas de Thomas, on suit à la lettre les ordres, il devra maintenant travailler pour se nourrir, fini le vice de la paresse! Après analyse, le bol interactif ne lui plaît pas du tout, il n’éprouve plus de plaisir à manger… On se dit que c’est ardu un régime, ça demande des sacrifices, c’est normal, après tout, c’est pour son bien, non? On le force à jouer, on coupe le nombre de calories, fini les gâteries, fini la lichette de yogourt devant la télé, c’est le carême! On supporte ses miaulements d’insatisfaction, ses comportements remplis de frustrations, c’est un vrai chemin de croix, mais c’est important pour qu’il vive mieux, non?  Puis, vient le jour de la pesée, rempli d’espoir, on a la foi… On constate alors que : Quoi? Thomas a pris du poids !? @#%!?!#&!!! Comment est-ce possible?

 

L’idée de restreindre la quantité et l’accès à la nourriture pour faire perdre du poids n’est pas toujours efficace. Elle provoque souvent un gain de poids. Tout comme le concept de faire travailler le chat pour s’alimenter s’accompagne d’un lot de frustrations et de comportements non désirés. Le principe de chasser pour se nourrir, dans un milieu naturel, ça va. Mais en captivité dans la maison d’un humain, c’est souvent désastreux.

Le phénomène de prise de poids, à la suite d’une privation, est une manifestation extraordinaire de l’adaptabilité de l’organisme. Que faire quand la ressource diminue? Faire des réserves pour survivre. C’est admirable comme stratégie n’est-ce pas? Alors pour faire perdre du poids, pourquoi ne pourrait-on pas s’inspirer de l’intelligence de l’organisme? Ne devrions-nous pas plutôt faciliter l’accès à la nourriture? Sans en augmenter, ni réduire la quantité, mais simplement faciliter l’accès à la ressource alimentaire pour faire maigrir? Comment réagirait l’organisme selon vous?

Selon la nature de son système digestif, le félin doit manger entre 16 et 20 repas par jour. De petits repas, mais à répétition. Pour ce faire, on pourrait diviser la quantité quotidienne de nourriture en plusieurs portions que l’on placerait à différents endroits dans l’habitat. De cette façon, l’accès à la nourriture serait multiplié, un constat rassurant pour le chat. Surtout rassurant pour son organisme, qui, devant tant de ressources, pourrait, non seulement éviter de faire des réserves, mais aussi éliminer des surplus stockés puisqu’il y aurait abondance!  Ainsi donc on pourrait amorcer une perte de poids lente certes, mais combien durable, efficace et surtout sans conflit.

 

Le fait de circuler d’un bol à l’autre pour manger pourrait occuper le chat, lui donner quelque chose à faire d’intéressant. Ce côté ludique est primordial dans l’acte alimentaire des félins. La notion de plaisir améliore la digestion. C’est ce que l’on tente de faire avec le bol interactif, divertir le chat, mais plus souvent qu’autrement, il est utilisé avec tellement d’autorité et de contrainte, qu’il en résulte un conflit entre le chat, son environnement et les humains.

Et si la santé et le bien-être du chat reposaient sur sa sécurité physique et émotive? Si sa sécurité elle, dépendait de l’accès à la ressource de façon simple et autonome? C’est plein de sens puisqu’ en nature, le chat choisi son territoire en fonction de l’abondance de ressources, mais le chat de maison n’a pas choisi le territoire, il vit en captivité. Selon vous, serait-il possible que de multiples problèmes, physiques et émotifs, surviennent lorsque l’humain exerce trop de contraintes dans la captivité?

 

Autant dire que la sécurité du félin repose sur nous, tout comme son confort réside dans la cohabitation harmonieuse avec l’humain.  Ce pourrait être simple en réalité. Avec une vision des choses moins autoritaire, plus empathique… Plutôt que représenter la captivité et la restriction, aux yeux de notre chat, nous pourrions lui apporter une quasi-autonomie alimentaire, le réconfort, la sécurité, tout en lui assurant santé et longévité.

Souvent, la solution la plus efficace est étonnamment la plus simple… La souffrance et les sacrifices n’ouvrent pas les portes du paradis, mais plutôt celles de l’enfer... Amen