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L’anxiété de séparation

par Richard Beaudet, éthologue

Aujourd’hui, les animaux de compagnie  sont complètement dépendants de leur maître. Généralement, ils se mettent à éprouver de  l’anxiété  de séparation envers un  seul individu de la famille. Alors  que  certains chiens s’ennuient en raison d’un manque d’activité ou d’un changement de routine, d’autres éprouvent de l’anxiété de séparation, une sorte de désorganisation neurologique qui n’est aucunement liée  à l’obéissance. Il n’y a pas d’âge pour développer ce trouble du comportement, qui n’a aucun lien avec le sexe ni avec la race de l’animal.

Les manifestations:
Lorsqu’un animal souffre d’anxiété de séparation parce que l’être auquel il est attaché est absent, deux des  trois premiers signes suivants sont présents:

-de la vocalisation excessive (hurlements, aboiements et gémissements);
-de la malpropreté;
-de la destruction ou du «mâchouillement» d’objets ou du grattage près  des sorties;
-des  diarrhées ou des  vomissements;
-de l’agressivité envers la personne à laquelle il est attaché lorsque celle-ci quitte le domicile.

Lorsque le maître est présent, il peut également observer que l’animal:

-salive excessivement à son retour;
-accueille son retour de façon débordante;
-recherche le contact avec l’être d’attachement;
-gémit s’il ne peut le voir, le toucher ou le sentir;
-le suit partout;
-le lèche beaucoup;
-n’aime pas être seul à l’extérieur;
-cherche à se coucher près de l’être d’attachement.

Les causes
La première cause de l’anxiété de séparation est l’anxiété permanente, qui se manifeste dès la naissance. Plusieurs éleveurs, craignant que les petits blessent les mamelles de leur mère, retirent précocement les bébés, soit dès la sortie de leur première canine supérieure (vers la quatrième semaine). Or, à l’état naturel, la mère ne se détacherait de ses petits que vers la cinquième semaine de leur vie. La deuxième cause est le manque de détachement, qui se transpose sur l’être auquel l’animal est attaché (souvent le maître). Le détachement survient généralement lorsque l’animal est âgé de 14 à 16 semaines, et le maître doit le mettre en application jusqu’à la fin de la période juvénile.

Lorsqu’une personne adopte un nouvel animal, elle veut lui donner de l’amour; or, c’est au cours de  cette période que l’animal a surtout besoin de liberté. Sans le vouloir, le maître suscite l’attachement plutôt que le détachement social de l’animal. Il lui donne trop d’attention à son départ et à son retour, alors qu’il devrait plutôt ignorer l’animal. En effet, pour aider l’animal à acquérir de la maturité, il faut banaliser le départ et l’arrivée à la mai- son. Pour ce faire, il faut éviter de  lui parler, de  le regarder (la chose la plus difficile à accomplir!)  et de  le toucher environ 15 minutes avant le départ et pendant les  15 à 20 premières minutes du retour à la maison.

L’animal qui souffre d’anxiété de séparation devient anxieux dès qu’il anticipe le départ de l’être auquel il est attaché: après avoir entendu le son du réveille-matin, par exemple. Une fois la personne partie, son niveau  d’anxiété  double. Environ 15 ou 20 minutes après le départ, le chien perd le contrôle et agit sur son environnement, sans toutefois être conscient de  son comportement.

Il pleure, jappe, se déplace dans tous les sens dans la maison en essayant de retrouver les odeurs du propriétaire (ce qui explique que l’animal détruise souvent ses souliers et qu’il urine sur son lit), et mâchouille ou détruit des objets. Ces manifestations comporte- mentales rétablissent habituellement son équilibre physiologique en abaissant temporairement son anxiété. Toutefois, de  75 à 90 minutes plus tard, son anxiété revient, et ce processus se répète tout au long de l’absence de l’être auquel il est attaché.

Il est préférable qu’un animal qui souffre d’anxiété de  séparation ne soit pas mis en cage durant la journée, car cela l’empêche de détruire des  choses (qui pourraient, en fait, être des  objets dédiés à cet effet!), de brûler de l’énergie en allant d’une porte et d’une fenêtre à l’autre, etc. Il risque donc d’adopter des  comportements compensatoires, comme se lécher excessivement, tourner sans cesse dans la cage ou essayer d’en sortir (ce qui implique des risques de  blessures aux dents ou aux griffes).
Traiter l’anxiété de séparation
Le plan de traitement peut être utilisé seul ou combiné à une médication, selon le cas. Mais, avant tout, il faut travailler au détachement, parce que la médication ne peut pas régler le problème en soi. Elle ne fait que rendre l’animal réceptif au traitement. Pour favoriser le détachement, il faut délimiter l’environnement de l’animal, car cela augmente son sentiment de sécurité et le rend moins dépendant de l’être auquel il est attaché lorsque celui-ci est présent.

Étape 1
Choisir deux zones qui seront attitrées à l’animal, et les  délimiter au moyen d’un  objet (coussin, tapis, etc.). Déterminer ces endroits par un mot précis (chambre,  coin, place, etc.). Demander ensuite à l’animal d’y  aller sans  que ce  soit punitif, en s’assurant  qu’il puisse y trouver des  choses qu’il affectionne (os, jouet, peluche, etc.). Lui demander ensuite d’y rester quelques secondes puis, au  fil  des jours, augmenter graduellement le temps qu’il  passe dans cette zone. Lorsqu’il se déplace avant d’y être autorisé, toutes les  personnes présentes doivent se lever et le remettre où il était, sans lui parler ni le regarder.

Il faut répéter l’exercice chaque fois qu’il se relève. Habituellement, l’animal obéit parfaitement après quelques jours, et il devrait, idéalement, être capable de  rester dans l’endroit désigné pendant 30 minutes. Il affectionnera même particulièrement cet endroit par la suite.

Étape 2
Lorsque l’animal a bien assimilé la première étape, lui demander d’aller à «sa place» lorsqu’il a tendance à suivre l’être auquel il est attaché partout dans la maison. Au début, lui dire d’y rester environ une minute. Le rappeler ensuite, lui demander de s’asseoir et lui donner de l’affection. Il est important de le sommer de s’asseoir d’abord.

S’il a été anxieux durant son attente, il interprétera l’affection comme une récompense. L’animal apprendra ainsi qu’il doit attendre pour recevoir de l’affection et il associera la caresse au fait qu’il a obéi lorsqu’il s’est assis. Évidemment, on obtient de  meilleurs résultats si on provoque les situations à plusieurs reprises pendant quelques jours. On peut également lui demander d’aller à «sa place» chaque fois qu’il recherche une attention excessive, comme lorsqu’il met la tête sur les genoux de l’être auquel il est attaché ou qu’il le pousse avec son museau.

Étape 3

Vous êtes maintenant prêt à désensibiliser votre animal aux stimuli de départ, c’est-à-dire aux gestes qui lui indiquent que vous vous apprêtez à quitter le domicile. Il suffit de simuler les gestes routiniers (enfiler vos souliers, prendre votre trousseau de clés, mettre votre manteau, toucher la poignée de  la porte)  en demandant à votre chien de rester à «sa place». Toutefois, il ne faut pas franchir la porte. Vous devez enlever votre manteau, redéposer vos clés,  etc., demander à l’animal de vous rejoindre et de s’asseoir, et le caresser. En répétant ces gestes de façon continue durant quelques semaines, vous l’amènerez à constater qu’ils ne sont pas toujours associés à un départ, et il finira par les banaliser.

Il est maintenant temps de désensibiliser votre animal au «vrai» départ. Répétez donc l’exercice mais, cette fois, ouvrez la porte sans sortir de la maison, puis répétez le scénario avec une sortie. Si l’animal demeure calme, récompensez-le. Sinon, pratiquez l’exercice pendant plusieurs jours. Le chien finira par tolérer votre départ et par demeurer calme.

Une amélioration notable survient généralement après deux ou trois semaines. Il faut tout de  même poursuivre  l’exercice  durant 8  à 12 semaines, selon le cas. Cependant, des  rechutes peuvent survenir à la suite de changements relationnels ou dans le milieu. Il suffit de répéter les exercices à nouveau, et les  changements dans le  comportement de l’animal seront plus rapides.